Renaud Suquet, un céréalier pas comme les autres

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Producteur de petit épeautre bio dans L’Hérault, Renaud Suquet est un défenseur de l’agriculture locale. Il dénonce la quasi-inaccessibilité des marchés publics aux agriculteurs locaux. Agriculteur depuis 30 ans, en bio depuis 15 ans, il est le représentant du collectif Biolocal34 depuis 2013. Rencontre.

« Avec la spécialisation de l’agriculture dans la viticulture et l’utilisation massive de produits pesticides qui est faite, nos sols, nos eaux et notre santé sont menacés ! » C’est dans ce contexte de dégradation de la qualité de l’eau et du sol, que ce quinquagénaire décide de se lancer dans la culture bio des céréales anciennes sur une dizaine d’hectares avec peu d’équipement. « À faire quelque chose, autant faire quelque chose de bien ». Situé dans la deuxième zone la plus aride en France, au milieu du thym, du romarin et des lavandins sauvages, sur le terroir des vins de Saint-Chinian et Minervois, dans les hauts cantons de Béziers sur les communes de Creissan, Villespassans, Quarante et Cruzy., il cultive en effet de l’épeautre et des légumineuses. « Grâce à mes cultures de céréales en Bio, aux rotations et à mes pratiques plus extensives, je m’attache à soigner les sols et à produire une récolte de qualité ».
La terre y est aride, les rendements assez pauvres (150 à 250 kg/ha) mais les qualités nutritives et gustatives de son petit épeautre sont remarquables ! Les boulangers et les chefs cuisiniers sont unanimes : cet engrain se distingue par son arôme de miel, de pain d’épice et de noisette, particulièrement intense. Son « grand cru Corbières » comme il s’amuse à l’appeler, on le trouve chez les plus grandes tables étoilées du Guide Michelin.


 UNE PRODUCTION DESTINÉE À LA CONSOMMATION LOCALE

Pour cette espèce, les rendements sont très faibles. Il favorise donc au maximum une distribution en circuit court auprès de groupements d’achat, de magasins Bio et mène un combat passionné pour pénétrer les cantines scolaires. Son projet n’est autre que de nourrir sans chimie les milliers d’enfants et adolescents, en couvrant le département de surfaces agricoles cultivées en agriculture biologique. Inlassablement, il communique sur cet engrain aux bienfaits exceptionnels et sur la place qu’il pourrait trouver dans notre alimentation.
« Le petit épeautre est une excellente céréale. Ses qualités nutritionnelles sont incomparables. Si l’on devait éliminer toutes les autres pour des raisons allergiques, il y en a une que l’on pourrait garder, c’est l’épeautre, parce qu’elle n’est pas encore modifiée génétiquement.»


 UNE CÉRÉALE QUI GAGNERAIT À ÊTRE CONNUE !

Elle est la première « domestiquée » par l’homme vers 7500 av. J.-C., au Proche Orient. Ce blé sera croisé avec d’autres à forte teneur en gluten pour donner le blé actuel que nous consommons. On le surnomme « blé des gaulois » ou encore le « caviar des céréales ».
Il a la particularité de bien nourrir, avec une petite quantité de grains, tout en nettoyant l’organisme. Il est riche et équilibré en éléments minéraux : 4 fois plus de magnésium que le riz brun, 5 fois plus de phosphore que le soja. « Cent grammes d’engrain apportent l’équivalent en calcium de
2 verres de lait », nous confie-t-il.
Il est également particulièrement riche en sodium, potassium, silicium, phosphore, soufre, fer, vitamines B1 et B2. Il contient aussi plus de protéines, de graisses, de fibres brutes que le blé et également des glucides particuliers qui jouent un rôle important dans la coagulation du sang et stimulent le système immunitaire. De récentes recherches lui reconnaîtraient même des vertus antidiabétiques.
Renaud Suquet cultive l’essentiel de son petit épeautre présent dans ses bocaux. En cas de mauvaise récolte, il complète avec des achats auprès d’une coopérative en Provence.
Il établit lui même ses recettes : cuit et assaisonné, mixé avec des légumes et des légumineuses, en pâtés végétaux épicés appelés caviars, en biscuit ou en encore en gressin. La cuisson et la mise en pots sont effectuées, chez lui, dans son atelier, en toute simplicité. Ses produits sont disponibles en vente directe les mardis et vendredis, de 16h30 à 19h30, au 1er étage de la gare Saint-Roch à Montpellier, l’occasion de partager avec lui sa philosophie du bon et du bio. Engagé pour la nourriture du futur, il aime se décrire comme un « paysan du bien-être ».

Marie Gineste